La filière équipementière en grande difficulté
Si la production automobile mondiale estimée en 2024 retrouve son niveau de 2019 avec 90 millions de véhicules légers, la situation en France est préoccupante. La production nationale de véhicules légers chute de 1,5 million en 2023 à 1,36 million de véhicules en 2024, soit un effondrement de 63% depuis 2002 et de 38% depuis 2020[1].
Une enquête menée par la FIEV / CLIFA en mars 2025 auprès de leurs adhérents révèle que plus de 70% considèrent qu’une partie de leur production en France et en Europe est menacée et que 55% ont déjà identifié un risque de dessourcing de la part des constructeurs en France et en Europe au profit de concurrents basés dans les pays à bas coûts.
Par ailleurs, en 2024, les effectifs des équipementiers se réduisent à environ 56 000 emplois, soit une baisse de 17% par rapport à 2019 et une division par deux depuis 2007[2]. Depuis janvier 2024, près de 7 300 emplois ont été supprimés ou sont menacés par des restructurations ou fermetures de sites[3]. Au niveau européen, 42% des fournisseurs prévoient d’être non-rentables en 2025[4].
Les équipementiers automobiles européens font face à quatre défis sans précédent :
- Contraints par la réglementation européenne imposant la fin des ventes de véhicules thermiques neufs d’ici 2035, les équipementiers automobiles ont déjà massivement investi pour transformer leur outil industriel. Cette transition technologique et industrielle, qui doit s’opérer en un temps record, exige des investissements colossaux tout en soulevant d’importants défis sociaux liés à la reconversion des salariés et des sites de production spécialisés dans le thermique. Ces investissements représentent aujourd’hui une charge financière considérable que le secteur doit absorber alors même qu’il devrait continuer de fortement investir.
- La période inflationniste 2022-2024 a encore accentué le décalage compétitif majeur avec l’Asie.
- Les équipementiers pâtissent d’une baisse générale des volumes de production de véhicules ainsi que de la stagnation de la part de marché des véhicules électriques en Europe. La fragilité de l’industrie automobile européenne menace directement notre souveraineté industrielle.
- Enfin, l’instauration de 25% de droits de douane supplémentaires sur les véhicules importés aux États-Unis.
Face aux conséquences de cette crise immédiate, menaçant emplois, compétences et équilibres industriels, le Plan d’Action sur l’avenir de l’industrie automobile présenté par la Commission européenne ne répond pas concrètement à l’urgence de la situation. Malgré une prise de conscience des difficultés liées à l’électrification et à la concurrence internationale, la FIEV et l’UIMM appellent la Commission européenne à prendre réellement la mesure de l’urgence en question dans le cadre des discussions en cours sur l’avenir de l’automobile européen.
Les propositions de la FIEV et de l’UIMM pour accompagner la transformation de la filière
Les pouvoirs publics européens et français doivent agir rapidement pour ne pas briser irrémédiablement la colonne vertébrale de notre souveraineté et favoriser des territoires prospères et attractifs.
Alors que la métallurgie représente une industrie sur deux et la filière automobile près de 23 000 emplois direct en Lorraine (soit environ 13% de l’emploi industriel régional[5] et 8% des emplois français du secteur), l’UIMM s’associe à la FIEV pour interpeller les pouvoirs publics et nourrir son action collective à l’échelle régionale, au service de la compétitivité de l’industrie et de la préservation de l’emploi.
Dans cette perspective, la FIEV et l’UIMM invitent les acteurs de la filière à réunir leurs forces pour défendre cette filière industrielle, et proposent trois axes d’action prioritaires :
- Adopter des mesures claires de contenu local européen : instaurer un seuil minimal de 75% à 80% de contenu local et définir ainsi le « fabriqué en Europe » à l’aide de règles d’origine européennes. La nouvelle règle d’origine européenne pourrait être utilisé dans différentes politiques clés de l’UE et des États membres (ex. dans les marchés publics, dans les programmes de décarbonation des flottes d’entreprises, dans les autres politiques d’incitation de stimulation de la demande de véhicules à zéro émission, dans les critères d’éligibilité aux aides pour les entreprises, dans les règles sur les investissements directs étrangers). L’enjeu dépasse la seule production : la délocalisation des sites industriels entraîne mécaniquement celle des centres d’ingénierie et de R&D, menaçant l’ensemble de la chaîne de valeur européenne.
- Restaurer la compétitivité de l’industrie automobile en France et en Europe, notamment dans le contexte de transition vers l’électrique, via la mise en œuvre d’un plan d’investissement européen inspiré de l’IRA américain, la réduction du prix de l’énergie, l’allègement en France des prélèvements obligatoires sur les salaires et les impôts de production, la simplification de l’accès aux financements, en particulier pour les PME.
- Décarboner le transport routier dans une approche globale : soutenir la vente de véhicules électriques, mettre en œuvre le principe de neutralité technologique en privilégiant une approche cycle de vie via la clause de révision et soutenir la fabrication de batteries en Europe.
[1] Chiffres de l’Organisation Internationale des Constructeurs Automobiles
[2] Chiffres de la FIEV
[3] Annonces publiques, analyse de la PFA
[4] Chiffres du CLEPA (Association européenne des fournisseurs automobiles)
[5] Chiffres de l’étude INSEE 2024
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